auteur: Udemnouvelles
source: https://nouvelles.umontreal.ca/article/2023/10/04/et-si-les-musees-jouaient-un-role-dans-la-promotion-de-la-sante-physique-des-aines/
Une étude dirigée par le professeur Olivier Beauchet, de la Faculté de médecine de l’UdeM, montre que les musées pourraient jouer un rôle dans le maintien de la santé physique des personnes âgées.
Les gens âgés qui prennent part à des ateliers de création dans un musée bougent davantage que ceux qui ne s’y adonnent pas. Une vérité de La Palice, songez-vous?
Ce serait le cas si l’augmentation de l’activité physique découlait directement de la participation à l’atelier. Ce qui n’est pas tout à fait le cas: les résultats d’un projet pilote dirigé par le gériatre et neurologue Olivier Beauchet indiquent que la hausse du nombre de pas s’effectue en dehors des heures où ils participent auxdits ateliers.
Professeur au Département de médecine de l’Université de Montréal et chercheur à l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal, le Dr Beauchet a une explication pour élucider le phénomène…
Prouver que l’art fait du bien
Actif depuis plus de 10 ans dans le domaine de la recherche sur les bienfaits de l’art chez les aînés, Olivier Beauchet travaille depuis 2015 sur les effets de l’art sur la santé en partenariat avec le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). Ce partenariat a abouti entre autres à un premier projet pilote auprès de 209 personnes âgées de plus de 65 ans qui prenaient part aux ateliers d’art Les beaux jeudis qu’offrait alors le Musée.
«Le projet est né de l’idée selon laquelle l’art fait du bien, mais encore faut-il le prouver, lance le gériatre. Ce premier projet a permis de montrer que la pratique des arts plastiques au Musée améliore la santé physique des aînés, mais les données reposaient sur un questionnaire d’autoévaluation, qui comporte une part de subjectivité.»
En 2019, le Dr Beauchet et son équipe ont analysé les données relatives à 53 individus âgés de 71 à 78 ans faisant partie du groupe initial de l’étude. Ces personnes ont porté une montre-podomètre qui a permis de mesurer sur une période de trois mois le nombre de pas qu’elles effectuaient quotidiennement. Ce sous-groupe a été divisé en deux: la moitié des gens participaient aux ateliers du jeudi au MBAM, tandis que ceux de l’autre moitié, qui composaient le groupe témoin, n’y assistaient pas.
Un grand pas pour la santé des aînés!
Entre le début de l’expérience et la fin, au bout des trois mois, les membres du groupe témoin ont fait 527 pas de plus par jour, en moyenne, soit une augmentation de 10 %. Or, les participants des Beaux jeudis ont effectué 3190 pas de plus quotidiennement en moyenne, une hausse de 42 %!
Selon les résultats de l’étude, publiés dans la revue European Geriatric Medicine, cette tendance était aussi observable lors des heures actives de la journée ainsi qu’au cours des heures «inactives» ou de repos, par exemple en soirée.
«La littérature indique qu’il faut faire environ 7000 pas par jour pour noter une différence sur la santé physique et les gens qui ont pris part aux ateliers d’art ont basculé du bon côté, passant de 6817 pas par jour en moyenne à plus de 10 000 pas: c’est une variation significative et très grande», se réjouit le Dr Beauchet.
De fait, les 3190 pas additionnels quotidiens équivalent à une distance d’environ 1,3 km par jour!
Un effet qui dépasse les murs du Musée
Les données recueillies par les montres-podomètres révèlent que l’augmentation du nombre de pas chez les participants des ateliers n’est pas exclusivement liée au fait de se déplacer pour aller au Musée: les aînés qui se sont rendus aux ateliers ont aussi marché davantage pour prendre part aux autres activités du MBAM.
«Le fait d’aller au Musée a contribué à la hausse du nombre de pas dans le groupe actif, mais pas suffisamment pour expliquer la totalité de la différence entre les deux groupes, explique le Dr Beauchet. Notre hypothèse est que l’activité au Musée favorise les interactions sociales au-delà de l’activité elle-même, ce qui rend les participants plus actifs physiquement.»
Cette hypothèse repose sur deux assertions. Sachant qu’une meilleure santé physique contribue à la santé mentale, il est plausible qu’une meilleure santé mentale encourage les participants à être plus actifs physiquement. De même, les ateliers offerts par le Musée sont des activités de groupe qui permettent aux gens d’interagir entre eux et, ainsi, de briser l’isolement social – qui est associé à la sédentarité.
Globalement, les ateliers d’arts plastiques suivis au Musée «rendent les gens plus interactifs socialement, on observe chez eux une amélioration de leur santé sociale», selon le professeur-chercheur.
«Bien que nos résultats doivent être interprétés avec précaution, puisqu’ils reposent sur un nombre restreint de sujets, ils tendent à démontrer que la participation à des activités d’arts plastiques contribue à une meilleure santé physique et qu’ainsi les musées pourraient jouer un rôle dans la promotion de la santé et la prévention de la maladie chez les personnes âgées», conclut Olivier Beauchet.